Monsieur le Premier président,
Mesdames et Messieurs les présidents,
Je suis heureux de vous accueillir à Paris en cette année de célébration du bicentenaire du code civil et je salue l’initiative prise ainsi par M. le Premier président de la cour de cassation.
Vous le savez, la justice est désormais au cœur de la construction européenne. Dans le cadre communautaire, l’espace judiciaire commun se concrétise jour après jour par l’adoption de textes normatifs, mais également par la coopération de plus en plus intense entre magistrats. Bien sûr, l’harmonisation textuelle est nécessaire dans certains cas et l’intense activité normative de l’Union européenne répond à ces besoins.
Mais, je crois également beaucoup aux contacts directs, pragmatiques, rapides entre magistrats qui permettent, jour après jour, de bâtir l’Europe de la justice. Les juges et procureurs apprennent à se connaître, à comprendre le système judiciaire de leurs voisins et trouvent ensemble les moyens de coopérer.
L’Europe avait incité à la création de magistrats de liaison pour favoriser cette coopération et la France a ainsi développé un réseau de six magistrats de liaison en Europe. Plus récemment, la constitution des réseaux judiciaires européens en matière pénale et en matière civile et commerciale ont permis à tous les magistrats de tous nos pays d’identifier rapidement et efficacement son interlocuteur dans le traitement d’affaires trans-nationales.
Au cours des discussions relatives à la future Constitution européenne, la France en lien avec l’Allemagne, a formulé de nouvelles propositions pour accélérer la construction de l’espace commun. Nous sommes favorables à la constitution , par étape et à partir de la structure existante d’EUROJUST, d’un parquet européen, car ce n’est qu’à l’échelle européenne que nous pourrons lutter efficacement contre les formes de criminalité internationales les plus graves.
Comme je l’indiquais, la construction de l’espace judiciaire commun ne repose pas sur la seule harmonisation des législations et des procédures. Nous progressons rapidement par la reconnaissance mutuelle des décisions de justice. Ce mécanisme permet à la fois de respecter les cultures et les traditions juridiques de chacun tout en garantissant des standards minimaux. Il permet surtout de faciliter la vie quotidienne de nos concitoyens et de nos entreprises en surmontant la complexité de nos procédures.
Mais ce principe trouve son corollaire dans une exigence particulière à l’égard de la qualité de la justice. C’est pour cette raison que j’ai souhaité que l’Union européenne crée un système d’évaluation permanente de la qualité de la justice dans nos différents pays, afin de garantir les conditions d’élaboration et de mise en oeuvre des décisions de justice qui devront s’appliquer sans contrôle dans nos pays respectifs. Ce contrôle permanent me paraît la condition indispensable à la confiance réciproque à la base de l’espace européen de justice.
MAis l’Europe ne se limite pas au domaine communautaire, tant les habitudes de travail commun prises à Bruxelles rejaillissent sur les relations bilatérales. Ainsi, nous sommes convenus avec l’Allemagne de rechercher le plus systématiquement possible à rapprocher nos législations, en dehors de toute impulsion de l’Union européenne.
Enfin, l’Europe ne s’arrête pas aux frontières de l’Union, même élargie. Tant les travaux normatifs du Conseil de l’Europe que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme exercent une forte influence dans nos pays, mais aussi à l’égard de l’Union.
Pour toutes ces raisons, je me réjouis de la création de votre réseau des chefs des cours suprêmes européennes car les échanges qu’il provoquera contribueront à la consolidation d’une culture judiciaire commune. Alors que l’Union accueille dix nouveaux membres, ce qui représente un saut important, je crois utile qu’une enceinte telle que la votre favorise les échanges approfondis entre représentants de systèmes juridiques et judiciaires souvent fort différents.
Vous partagez de nombreux sujets de réflexion communs concernant notamment l’application du droit communautaire ou de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, ou encore le fonctionnement et le positionnement de vos institutions qu’il me paraît utile d’approfondir.
cette tâche est importante et je vous souhaite d’excellents travaux afin de la concrétiser.
Je vous remercie